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Mélodies à découvrir, Mélodies de toujours
Anne Baquet, soprano Damien Nédonchelle, piano

POL 160 751
Pol

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Polymnie
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Tchaïkovsky
Gounod
Fauré
Chabrier
Hahn
Busser
Toldra
Gallois Montbrun
Hubeau
Dutilleux
Poulenc
Beydts
Dutilleux
Pascal
Cosma




en écoute : Tchaïkovsky, Il m'aimait tant

 
 



Ce CD se présente, en quelque sorte, comme le contraire d’une "Intégrale". Nous avons pioché, ça et là, parmi nos mélodies préférées. D’où, peut-être, cette impression de bariolage. On aura compris que le seul lien existant est un lien affectif.
Ne négligeons pas, pour autant, le lien spécifique qui unit neuf de ces mélodies : ce sont des mélodies françaises enregistrées pour la première fois.
Gérard Durantel

Anne Baquet fait ses études musicales en Russie puis en France où elle suit des cours de danse et de comédie. Elle se produit dans le monde entier, avec Karine Saporta, Michael Nyman, et le cirque de Barbarie. En 1997, elle crée avec Claudine Allegra son récital "J'aurais voulu dev'nir chanteuse". Elle obtient le Prix Charles Oulmont. En 1999, elle crée un nouveau spectacle, en Suisse puis à Paris. L'enregistrement de son troisième spectacle obtient un "Choc du Monde de la musique".

Né en 1957, Damien Nédonchelle commence la musique à l'âge de cinq ans. En 1967, il est admis au CNSM de Paris, dans les classes de piano, musique de chambre, écriture, et accompagnement.Titulaire de six prix au CNSM et admis au cycle de perfectionnement de piano, il remporte une médaille d'or au Concours international Viotti. Il collabore avec un grand nombre d'interprètes, tant en soliste qu'en musique de chambre, ou encore en tant que compositeur. Pianiste complice des spectacles d'Anne Baquet, il est depuis 1985 directeur du Conservatoire de Gagny et actuellement directeur-adjoint du CNR de Boulogne-Billancourt.

 

Apoutchin (1841-1893) - Tchaïkovski (1840-1893) Il m’aimait tant ! (1875)
Cette mélodie est contemporaine du célèbre opéra du compositeur, Eugène Onéguine (1879). Doucement mélancolique, elle est à la fois subtile et proche du caractère populaire du folklore russe. On remarquera qu’Apouchtin, cet ami très cher de Tchaïkovski, est mort la même année que lui.

Il m’aimait tant mais moi je ne l’aimais pas
Pourtant, chaque fois qu’il venait, je rougissais et tremblais
et mon cœur cognait fort.
Il m’aimait tant mais moi je ne l’aimais pas !
Donc, je m’occupais de ses fleurs
et portais ses robes préférées pour lui plaire ;
puis je lui parlais et j’essayais d’attirer ses regards.
Il m’aimait tant mais moi je ne l’aimais pas !
Un jour il m’a demandé d’aller au bosquet
à l’heure du coucher du soleil et j’ai dit oui.
Mais le courage m’a manqué
et le pauvre garçon m’a attendue en vain !
Il a dû être très fâché
et m’a probablement maudite.
Je ne le reverrai pas, j’ai du chagrin et je pleure…
Car il m’aimait tant…

 

Tolstoï (1838-1910) - Tchaïkovski (1840-1893) Au milieu du tumulte du bal (1880)
Chacun des trois couplets de cette émouvante mélodie gagne en amplitude sonore. La voix donne l’exemple avec ces quasi cadences qui ponctuent la fin de chaque couplet : la première atteint le fa dièse ; la seconde grimpe un ton plus haut – sol dièse ; la troisième s’envole vers le si. Le piano n’est pas en reste, qui va du sobre au très orné. On notera le bel effet que produit – à mi-chemin du couplet – la doublure du chant à la main gauche, à l’octave inférieure.

"Dans le brouhaha d’une foule tourbillonnante, c’est par hasard que je t’ai aperçue, renfermée dans ton secret, le regard triste – mais ta voix à la sonorité divine rappelait une flûte lointaine ou le murmure de la mer. J’ai aimé ta fine silhouette et ton regard songeur. À jamais ton rire mélancolique mais vibrant résonnera dans mon cœur."

 

Sourikov (1841-1880) - Tchaïkovski (1840-1893) N’étais-je pas un petit brin d’herbe ? (1880)
Chacun dans sa sphère, Tchaïkovski et Fauré ont écrit plusieurs dizaines de mélodies. C’est peu de dire que leurs musiques respectives diffèrent du tout au tout. Aussi est-on fort surpris de découvrir – dans la présente mélodie – un passage de huit notes venu tout droit de celle de Fauré, intitulée Au bord de l’eau (1865). Antérieure de quinze ans, cette mélodie a-t-elle pu venir à la connaissance de Tchaïkovski ?
Le passage en cause est facile à repérer : chez Fauré, c’est sur les paroles : « … tous deux devant tout ce qui lasse » ; chez Tchaïkovski, c’est à 48 secondes du début dans le présent enregistrement.
Si l’on connaît bien les deux mélodies et si l’on se chante intérieurement ce passage, on se surprend à enchaîner, tantôt avec l’une, tantôt avec l’autre des deux œuvres.

Un petit brin d’herbe se plaint d’avoir été coupé et mis à sécher au soleil.
« O malheur à moi, voyez mon triste destin ! »
Une petite rose poussant dans l’herbe a été cueillie, brisée et enserrée dans un bouquet.
« O malheur à moi, voyez mon triste destin ! »
Une jeune fille fait remarquer qu’elle est la petite fleur de sa mère. Elle se lamente parce qu’on l’a mariée contre son gré à un vilain vieil homme gris.
« O malheur à moi, voyez mon triste destin ! »

 

Armand Silvestre (1830-1901) - Gabriel Fauré (1845-1924) Automne (1880)
Automne est un exemple frappant du pouvoir d’évocation lié à une économie de moyens propre à Fauré. L’odeur de l’automne, les couleurs bronze et brique de ses feuilles sont tout entières contenues dans la douce ligne mélodique qui – à la main gauche – avance à pas lents et feutrés. La voix lui fait écho à sa manière ; les deux lignes mélodiques bientôt se répondent, s’enlacent – et c’est un moment d’intense bonheur.

Automne aux ciels brumeux, aux horizons navrants,
Aux rapides couchants, aux aurores pâlies,
Je regarde couler comme l’eau du torrent,
Tes jours faits de mélancolie.
Sur l’aile des regrets mes esprits emportés,
Comme s’il se pouvait que notre âge renaisse !
Parcourent en rêvant les coteaux enchantés,
Où jadis, sourit ma jeunesse !
Je sens, au clair soleil du souvenir vainqueur,
Refleurir en bouquet les roses déliées,
Et monter à mes yeux des larmes qu’en mon cœur
Mes vingt ans avaient oubliées !

 

Rosemonde Gérard (1871-1953) - Emmanuel Chabrier (1841-1894) Villanelle des petits canards (1889)
« Ma volaillerie », avait coutume de dire Chabrier, parlant de la présente mélodie, de la Ballade des gros dindons et de la Pastorale des cochons roses.
Ces mélodies, où triomphent l’humour et la bonne humeur, ont été écrites sur des textes d’Edmond Rostand, âgé de 21 ans et encore inconnu du grand public, et de sa fiancée, Rosemonde Gérard, 18 ans. Rappelons que Jean Rostand, le célèbre biologiste et écrivain, était leur fils.

Ils vont, les petits canards,
Tout au bord de la rivière,
Comme de bons campagnards !
Barboteurs et frétillards,
Heureux de troubler l’eau claire,
Ils vont, les petits canards,
Ils semblent un peu jobards,
Mais ils sont à leur affaire,
Comme de bons campagnards !
Dans l’eau pleine de têtards,
Où tremble une herbe légère,
Ils vont, les petits canards,
Marchant par groupes épars,
D’une allure régulière,
Comme de bons campagnards
Dans le beau vert d’épinards
De l’humide cressonnière,
Ils vont, les petits canards,
Et quoiqu’un peu goguenards
Ils sont d’humeur débonnaire,
Comme de bons campagnards.
Faisant, en cercles bavards,
Un vrai bruit de pétaudière,
Ils vont, les petits canards,
Dodus, lustrés et gaillards,
Ils sont gais à leur manière,
Comme de bons campagnards.
Amoureux et nasillards,
Chacun avec sa commère,
Ils vont, les petits canards,
Comme de bons campagnards !

 

Paul Verlaine (1844-1896) - Reynaldo Hahn (1875-1947) D’une prison (1892)
Reynaldo Hahn n'avait que 17 ans quand il a mis en musique ce poème de Verlaine, extrait de Sagesse. Deux ans plus tard, Gabriel Fauré s'emparait du même texte sous le titre Prison.
Reynaldo Hahn eut son heure de gloire - surtout avec ses opérettes (Ciboulette) - avant que certains milieux musicaux ne le regardent avec condescendance. J'admire, pour ma part, la grande simplicité harmonique (les 14 premières mesures reposent seulement sur deux accords), la clarté du plan et la parfaite prosodie de ces pages. Économe de ses munitions, l'auteur n'utilise le mode mineur qu'au moment des paroles : "Qu'as-tu fait, ô toi que voilà pleurant sans cesse…"

Le ciel est par-dessus le toit,
Si bleu, si calme
Un arbre par-dessus le toit
Berce sa palme.
La cloche dans le ciel qu’on voit
Doucement tinte
Un oiseau sur l’arbre qu’on voit
Chante sa plainte.
Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.
- Qu’as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse
Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà
De ta jeunesse ?

 

Gabriel Vicaire (1848-1900) - Reynaldo Hahn (1875-1947) Cimetière de campagne (1893)
Cette mélodie est – à mon avis – une des plus réussies de son auteur. On y décèle – comme dans la mélodie précédente, D’une prison – un langage harmonique et une prosodie parfaitement naturels.
Reynaldo Hahn n’avait rien d’un révolutionnaire ni même d’un novateur. Il n’en a que plus de mérite d’avoir su se frayer un chemin entre un Fauré, un Debussy, sans même parler de Ravel (né la même année que lui). On sait, par la correspondance de Proust à R. Hahn, que l’auteur de La Recherche a essayé, avec infiniment de tact, mais en vain, de convaincre R. Hahn que Pelléas et Mélisande était un chef-d’œuvre. Curieusement, à la même époque, Romain Rolland déployait les mêmes efforts infructueux pour la même cause, vis-à-vis de Richard Strauss qu’il admirait profondément. Deux hommes de lettres essayant de convaincre deux musiciens…

J’ai revu le cimetière
Du beau pays d’Ambérieu
Qui m’a fait le cœur joyeux
Pour la vie entière,
Et sous la mousse et le thym,
Près des arbres de la cure,
J’ai marqué la place obscure
Où, quelque matin,
Libre enfin de tout fardeau,
J’irai tranquillement, faire
Entre mon père et ma mère,
Mon dernier dodo.
Pas d’épitaphe superbe
Pas le moindre tra la la,
Seulement, par ci, par là,
Des roses dans l’herbe,
Et de la mousse à foison,
De la luzerne fleurie,
Avec un bout de prairie
À mon horizon !
L’église de ma jeunesse,
L’église au blanc badigeon,
Où jadis, petit clergeon,
J’ai servi la messe.
L’église est encore là, tout près,
Qui monte sa vieille garde
Et, sans se troubler, regarde
Les rangs de cyprès.
Entouré de tous mes proches,
Sur le bourg comme autrefois,
J’entendrai courir la voix
Elles ont vu mes vingt ans !
Et n’en sont pas plus moroses.
Elles me diront des choses
Légère des cloches…
Pour passer le temps.

 

Maurice Vaucaire (1865-1918) - Henri Busser (1872-1973) Du haut de l’arbre (extrait de Maman chante avec nous) (1901)
Qu’on me permette une anecdote personnelle : j’avais 12 ans et je venais de chanter le rôle du "petit Yniold" dans Pelléas et Mélisande sur la scène du Théâtre des Champs-Elysées. C’étaient les débuts d’Etcheverry, dans le rôle de Golaud, personnage qu’il devait incarner avec tant de profondeur pendant des années. Je n’étais pas avare de mon affection pour ce « petit père » d’un jour… A la même époque, concert à l’Institut de France, salle Comtesse de Caen. Au programme, un recueil de mélodies d’Henri Busser : Maman chante avec nous3. Ces mélodies ont dû me frapper puisque, beaucoup plus tard, je m’en suis souvenu, au moment d’établir le programme de ce CD. À l’époque reculée dont je parle, j’ignorais évidemment le rôle que le tandem Busser-Etcheverry allait jouer dans ma vie d’étudiant. En effet, je me suis retrouvé, un beau jour, dans la classe de composition de Busser. Et qui a été l’un des trois interprètes de ma cantate de Concours de Rome ? Etcheverry.
On appréciera, je pense, la finesse et le gracieux élan de cette page de Busser. En un rien de temps, ce dernier sait faire venir l’émotion au moment de savoir « …où s’en vont les grands nuages ? ».

Du haut de l’arbre où j’ai grimpé, Du haut de l’arbre où j’ai grimpé,
Je vois le jardin d’la voisine, Je vois courir les grands nuages,
Et son époux tout occupé Et tous les oiseaux se grouper,
A fair’ un bouquet d’capucines. Pour faire un long lointain voyage
Ah ! le beau rosier Vers les pays chauds
Et les cerisiers S’en vont les oiseaux
Qu’on voit au jardin d’la voisine. Mais où s’en vont les grands nuages ?
Du haut de l’arbre où j’ai grimpé, Du haut de l’arbre où j’ai grimpé,
Je vois la maison du voisin, Je vois m’attendre mon cher père.
Et le voisin, en train d’souper Il me paraît préoccupé,
D’un pâté chaud et de raisin. Est-ce qu’il serait en colère ?
Ah ! le souper fin, Il est en planton
Mon Dieu que j’ai faim, Avec un bâton.
Quand j’vois la maison du voisin ! J’ai désobéi à mon père

 

Lope de Vega (1562-1635) - Eduardo Toldrá (1895-1962) Madre, unos ojuelos vi (1940)
Un coup de cœur ! C’était en 1980, j’écoutais un 33 tours que je venais de recevoir : des mélodies espagnoles. Une musique séduisante, une belle interprétation. Et tout à coup, un diamant ! Cette mélodie de Toldrá ? Un concentré d’Espagne qui vous transperce l’âme.

Ma mère, j’ai vu les yeux Comment aurais-je pu croire
Des yeux verts gais et si beaux que leur couleur fût si trompeuse !
Mais qui ne l’eût pensé Hélas, je me meurs d’amour
et ils se moquent de moi ! s’il n’en était amoureux ?
Les pupilles de leurs cieux Mère, je me suis perdu
ont si bien changé les choses Il faut en eux me chercher.
que leur couleur d’espérance Hélas, je me meurs d’amour
est pour moi couleur de jalousie. et ils se moquent de moi !
Je crois, mère, que j’ai vu
vie et mort en les voyant.
Hélas, je me meurs d’amour
et ils se moquent de moi !

 

Jean Mariat (1903-1972) - Raymond Gallois Montbrun (1918-1994) Chanson - Lorsque tu dors (1941)
Compositeur profondément original, violoniste hors pair, 1er grand prix de Rome, membre de l’Institut, directeur de l’Ecole nationale de musique de Versailles, puis du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, brillant orateur, Raymond Gallois Montbrun décourage les épithètes flatteuses. Une amitié sans nuages a existé entre nous pendant 52 ans – de 1942 à sa mort en 1994.
C’est précisément en 1942 que j’ai entendu pour la première fois les présentes mélodies, écrites en 1941. La scène se passait à la classe de composition d’Henri Busser. Agglutinés autour de l’auteur au piano, subjugués, ravis, conquis, tous les élèves recevaient, comme une bouffée d’air frais, cette musique si raffinée en même temps que parfaitement naturelle. Ces pages ravissantes, dédiées à son interprète Charles Panzéra, ont malheureusement sombré dans l’oubli. Nous sommes heureux de redonner vie ici à deux d’entre elles. (Le titre de la troisième est Souvenir.)

 

Paul Fort (1872-1960) - Jean Hubeau (1917-1992) La Ronde (1942)
Jean Hubeau a laissé le souvenir d’un artiste complet et particulièrement précoce. Il avait tout juste 17 ans quand il obtint le 1er second grand prix de Rome. Et 21 ans quand il reçut le Grand Prix du disque pour son enregistrement de la Sonate arpeggione de Schubert, avec le violoncelliste Pierre Fournier. Et à 25 ans, le voici directeur du Conservatoire de Versailles, fonctions qu’il occupe jusqu’en 1957 et où il déploie une grande activité de chef d’orchestre. Peu après, il est nommé professeur de musique de chambre au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. De cette classe - de renommée internationale - sont sortis bien des artistes aujourd’hui célèbres.
Les grands prix du disque se sont succédé tout au long de sa carrière : musique de chambre de Fauré en 1970, l’Intégrale de la musique de chambre de Schumann en 1981, l’Intégrale de l’œuvre pour piano de Fauré en 1991.
Parmi ses nombreuses compositions, malheureusement trop ignorées des mélomanes, nous avons choisi cette Ronde pleine d’élan et de spontanéité (extraite du recueil Quatre chansons de Paul Fort).

Si toutes les filles du monde voulaient s’donner la main
Tout autour de la mer elles pourraient faire une ronde
Si tous les gars du monde voulaient bien êtr’ marins
Ils f’raient avec leurs barques un joli pont sur l’onde
Alors on pourrait faire une ronde autour du monde
Si tous les gens du monde voulaient s’donner la main.

 

Edmond Borsent (1904-1986) - Henri Dutilleux (1916) Pour une amie perdue (1942)
Cette mélodie fait partie d’un groupe de cinq paru en 1943. Y figure notamment Regards sur l’infini, poème d’Anna de Noailles. Dans la présente mélodie, sur une succession d’accords à la fois simples et raffinés, le chant élève sa plainte. L’ensemble s’inscrit dans une courbe émouvante qui trouve sa conclusion sur un accord parfait majeur, porteur soudainement d’une lueur d’espoir.

J’ai fait pour t’oublier, tout ce que je pouvais. C’est fini ; c’est fini. Je serais vainqueur si je n’entendais pas, si je n’entendais plus, le son charmant qu’avait ta petite voix dans mon cœur.

 

Louis Aragon (1897-1982) - Francis Poulenc (1899-1963) C (1943)
Le 8 décembre 1943, concert à la salle Gaveau à Paris. Sur scène, Francis Poulenc au piano, Pierre Bernac chantant. Au terme de ce récital, un bis. Au sujet de ce bis, voilà ce que nous déclare Irène Joachim citée par Brigitte Massin : « Je le vis arriver [le chef d’orchestre Roger Désormière] absolument bouleversé : il sortait de chez Poulenc qui venait de lui jouer une mélodie nouvelle chantée par Bernac qu’ils avaient l’intention de donner en bis au concert. Poésie et musique y sont aussi magnifiques l’une que l’autre : c’est sur un poème d’Aragon, une mélodie bouleversante. De fait, le public, surpris, est devenu tellement fou de bonheur que les interprètes on dû redonner ce bis. » Brigitte Massin ajoute : «Les ponts de Cé, sur la Loire, virent passer ensemble, en mai et juin 1940, les réfugiés et les soldats en déroute qui tentaient de franchir le fleuve pour gagner le sud de la France.»

J’ai traversé les ponts de Cé
C’est là que tout a commencé
Une chanson des temps passés
Parle d’un chevalier blessé
D’une rose sur la chaussée
Et d’un corsage délacé
Du château d’un duc insensé
Et des cygnes dans les fossés
De la prairie où vient danser
Une éternelle fiancée
Et j’ai bu comme un lait glacé
Le long lai des gloires faussées
La Loire emporte mes pensées
Avec les voitures versées
Et les armes désamorcées
Et les larmes mal effacées
Ô ma France ô ma délaissée
J’ai traversé les ponts de Cé

 

Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859) - Louis Beydts (1895-1953) Un cri (1944)
Louis Beydts a donné le meilleur de lui-même dans l’opérette (Moineau, À l’Aimable Sabine) et la musique de film (La Dame de Malacca, La Kermesse héroïque). A la fin de sa vie, plusieurs fois, à ma demande, lorsque j’allais lui montrer mes propres compositions, il m’a joué et chanté Un cri. Je me suis souvenu de cette émouvante mélodie lorsque le programme du présent CD a été établi. Rappelons que ce fin musicien a été le directeur artistique du premier et célèbre enregistrement (78 tours) de Pelléas et Mélisande, avec la distribution inoubliable d’Irène Joachim, de Jacques Jansen et d’Etcheverry, sous la direction de Roger Désormière.

Hirondelle
Est-il au monde un cœur fidèle
Ah ! S’il en est un, dis-le moi
J’irai le chercher avec toi
Sous le soleil ou les nuages
Guidée à ton vol qui fend l’air,
Je te suivrai dans le voyage
Rapide et haut comme l’éclair.
Allons vers l’idole rêvée,
Au Nord, au Sud, à l’Orient,
Du bonheur de l’avoir trouvée,
Je veux mourir en souriant.

 

Jean Gandrey-Rety (1901-1962) - Henri Dutilleux (1916) Chanson de la déportée (22 septembre 1945)
Pendant l’Occupation, tout un groupe comprenant musiciens, écrivains, cinéastes s’était formé autour de la notion de « Résistance », donnant naissance à quelques œuvres majeures. Citons Figure humaine (1943), texte d’Eluard, et Cé (1943), texte d’Aragon, musique de Poulenc ; Quatre chants de la France malheureuse (1943), musique de G. Auric sur des poèmes d’Eluard, de Jules Supervielle, d’Aragon ; Les Visions de l’Amen (1943) pour 2 pianos de Messiaen ; enfin, la présente mélodie.
La Chanson de la déportée précède de peu la composition du chef-d’œuvre que représente la Sonate pour piano.

Depuis des jours et des jours avec leurs nuits sans sommeil,
Je n’ai pas revu mes amours ni le ciel, ni le soleil, ni mon enfant.
Sous mes haillons en lambeaux,
Je n’ai plus forme vivante, comme une ombre sans repos je suis déjà morte errante, sans mon enfant.
C’est en moi qu’est la clarté.
Là, je garde, illimités, tous les trésors de l’horizon, toutes les fleurs, toute la joie et la chanson de mon enfant.

 

Claude Pascal (1921) - Claude Pascal J’ai voulu te rejoindre (1982)
L’avantage d’être son propre parolier, c’est que musique et texte se portent mutuellement assistance. Panne de musique ? Le texte vous porte ; et réciproquement. C’est ainsi qu’après cette mélodie, j’ai écrit le livret de mon opéra cosmique pour enfants, Framboise et Amandine, les jumelles de l’espace, puis mes Quatre Farfelettes pour soprano et piano et le recueil de trois mélodies, Top Model et Cie, également pour soprano et piano.

J’ai voulu te rejoindre en grand secret : Vous tournoyez dans ma mémoire,
Tu m’as échappé à jamais Me laissant triste et lassé.
J’ai voyagé, lointaine demoiselle,
Tu restes la plus belle. Je songe à cette attente vide,
Pauvre marionnette harassée !
Point de lumière qui me guide, Que cerne une indicible peine,
Point de lueur à l’horizon. Mêlée d’espoirs fous, insensés !
Saurai-je où poser mon front vide, J’ai voulu te rejoindre en grand secret :
Moi qui ai perdu la raison ? Tu m’as échappé à jamais.
Chemin creux, sentiers de gloire, J’ai voyagé, lointaine demoiselle,
Lacs immobiles et glacés, Tu restes la plus belle.

 

Hamisa Dor - Vladimir Cosma (1940) Promenade enchantée (1996)
Issue de la belle musique de son film Diva, cette mélodie – dans un tempo de valse lente – repose sur un jeu subtil de trois modulations, à la fois simples et raffinées : va-et-vient entre les modes phrygien, majeur et hypolydien. On remarquera que chaque séquence commence par un « saut d’octave », intervalle dont la neutralité permet aux interprètes de déployer une large palette d’expressions.

Adieu, rêves de jeunesse Au-delà de l’infini
Souvenirs du temps passé L’amour loin d’être mirage,
La vie vole ses promesses Redevient mon secret
Au miroir de mes pensées Bonheur chasse les nuages
Au loin, l’ombre de mon âme Quand le cœur se remet
Doux espoirs dérobés Adieu, rêves de tristesse
Soudain sèchent mes larmes Le miroir enchanté
Promenades enchantées L’espoir tient ses promesses
J’entends, chants de ma jeunesse Promenades enchantées
Un élan de nostalgie Le miroir de mon passé
La nuit montre sa tendresse Le miroir de mes pensées

Polymnie

Foreword
This C.D. is, as it were, the opposite of a « complete works ». We all dipped here and there into our stock of favourite melodies. Whence, perhaps, an impression of motley. The only link between them is of course the fact that they aroused emotion. It should not be overlooked, however, that a specific link unites nine of them : they are French melodies here recorded for the first time.
Gérard Durantel

Apoutchin (1841-1893) - Tchaïkovski (1840-1893) Il m’aimait tant ! (1875)
This melody is contemporary with the composer’s famous opera, Eugène Onéguine (1879). Quietly melancholic, it is both subtle, and at the same time close to the popular character of Russian folklore. Apoutchin was Tchaïkovski’s very dear friend, and they died the same year.

Tolstoï (1838-1910) - Tchaïkovski (1840-1893) Au milieu du tumulte du bal (1880)
Each of the three couplets of this moving melody increases in volume. The voice sets the example with these quasi-cadenzas punctuating the end of each couplet: the first reaches F sharp ; the second climbs a key higher : G sharp ; the third soars up towards B. The piano is not to be outdone, going as it does from sober to highly ornate. Notice the dramatic effect produced – half-way through the couplet – by the left hand doubling the voice, an octave lower.

Sourikov (1841-1880) - Tchaïkovski (1840-1893) N’étais-je pas un petit brin d’herbe ? (1880)
Each in their realm, Tchaïkovski and Fauré wrote scores of melodies. Naturally their music differs completely. It is all the more surprising to discover in this melody a passage of eight notes that is the exact replica of a sequence in Fauré’s melody Au bord de l’eau (1865). This melody was written 15 years earlier. Could Tchaïkovski have come across it ? The passage is easily found: in Fauré it starts with : “…tous deux devant tout ce qui lasse” ; in this recording of Tchaïkovski, it is 48 seconds after the beginning. If one is familiar with both melodies and starts humming this passage, it is just as natural to continue with the one as with the other.

Armand Silvestre (1830-1901) - Gabriel Fauré (1845-1924) Automne (1880)
Automne is a striking example of Fauré’s gift of evocation by incredibly simple means. The scent of autumn, its bronze and brick-red leaves are perceptible to the listener in the gentle melodic line of the left hand advancing slowly and softly. The voice echoes in its own fashion, soon the two melodic lines entwine, and it is a moment of intense happiness.

Rosemonde Gérard (1871-1953) - Emmanuel Chabrier (1841-1894) Villanelle des petits canards (1889)
Chabrier was wont to refer to these little ducks, and the fat turkeys of the Ballade and the pink pigs of the Pastorale, as his “poultry farm”. A sense of humour, together with good humour, triumphs in these melodies, that were composed on texts by Edmond Rostand – then aged 21 and as yet unknown to the general public – and his fiancée Rosemonde Gérard, aged 18. It is interesting to recall that their son was to be the eminent biologist and writer, Jean Rostand.

Paul Verlaine (1844-1896) - Reynaldo Hahn (1875-1947) D’une prison (1892)
Reynaldo Hahn was only 17 when he set to music this poem by Verlaine, taken from Sagesse. To years later, Gabriel Fauré was inspired by the same text and composed Prison. R. Hahn had his hour of glory - especially with his operettas (Ciboulette) - before certain musical circles took to consideraring him with condescendance. Personally, I admire the harmonic simplicity (the first 14 bars are based on just two chords), the clearness of plan and the perfect prosody of these pages. Deliberately holding back his emotions, the composer employs the minor mode solely for the words : “Qu’as-tu fait…” (“What have you done with your youth?”).

Gabriel Vicaire (1848-1900) - Reynaldo Hahn (1875-1947) Cimetière de campagne (1893)
This melody is, to my mind, among the composer’s most successful. As in the preceding one, D’une prison, the harmonic idiom and the prosody are perfectly natural. Reynaldo Hahn was by no means a revolutionary or even an innovator. He deserves all the more credit for making his way between the giants Fauré and Debussy, not to mention Ravel, born the same year as himself. We know, from the letters that Proust wrote to R. Hahn, that the author of La Recherche attempted with the utmost tact, but in vain, to convince him that Pelléas et Mélisande was a master-piece. Curiously enough, at the same time, Romain Rolland was unsuccessfully pleading the same cause with Richard Strauss, whom he deeply admired. Two literary figures attempting to convince two musicians…

Maurice Vaucaire (1865-1918) - Henri Busser (1872-1973) Du haut de l’arbre (extrait de Maman chante avec nous) (1901)
A personal anecdote : when I was twelve, I sang the role of little Yniold in Pelléas et Mélisande at the Théâtre des Champs Elysées. Etcheverry was making his début in the role of Golaud – character that he was to play with such depth for so many years. I developed an enormous affection for my “little father” Golaud during the many rehearsals and the one unique performance. The same year, there was a concert at the Institut de France, salle Comtesse de Caen, and one of the items on the programme was a collection of melodies by Henri Busser, Maman chante avec nous1. These melodies must have struck me, for they came to my mind – so many years later – when I was preparing this C.D. And of course I had no idea, when I heard them at that distant time, of the role that the tandem Busser-Etcheverry was to play in my student life. For, one fine day, I found myself in Busser’s composition class. And who was one of the three singers of my Prix de Rome cantata? Etcheverry.
The delicacy and gracious sprightliness of this melody will, I think, be appreciated. In next to no time, emotion is aroused on the words “…where do the clouds go when they disappear ?”

Lope de Vega (1562-1635) - Eduardo Toldrá (1895-1962) Madre, unos ojuelos vi (1940)
A special favourite ! In 1980 I was listening to an L.P. of Spanish music I’d just received. Seductive music, a fine voice. Then suddenly, a diamond ! This melody by Toldrá ? A concentrate of Spain to stir the depths of one’s soul.

Jean Mariat (1903-1972) - Raymond Gallois Montbrun (1918-1994) Chanson - Lorsque tu dors (1941)
One lacks epithets elogious enough for Raymond Gallois Montbrun : he was a profoundly original composer, a remarkable violinist, 1er Grand Prix de Rome, director of the Versailles national school of music, then of the Paris CNSM, brilliant orator… Our friendship was without a cloud for 52 years – from 1942 to his death in 1994. It was in fact in 1942 that I first heard these melodies, written in 1941. In Henri Busser’s composition class, we students, clustered round the composer at the piano, were absolutely enthralled by the freshness of this music, so refined and at the same time so natural. Sad to say, after being interpreted by Charles Panzéra, to whom they were dedicated, these ravishing pages fell into oblivion. So we have great pleasure in restoring two of them to life. (The title of the third one is Souvenir.)

Paul Fort (1872-1960) - Jean Hubeau (1917-1992) La Ronde (1942)
Jean Hubeau remains in our memory as the complete, and particularly precocious, artist. He was only just 17 when he won the 1st second grand prix de Rome. And 21 when he was awarded the Grand Prix du disque for his recording of Schubert’s Sonate arpeggione with the cellist Pierre Fournier. Then at 25 he is director of the Versailles Conservatoire where he will stay until 1957 – and where he is particularly active as conductor. Shortly afterwards he is appointed professor of chamber music at the Paris Conservatoire. And from this internationally renowned class came many artists who are famous to-day.
He continued throughout his career to receive various Grand Prix du disque : Fauré’s chamber music in 1970 ; the complete set of Schumann’s chamber music in 1981 ; Fauré’s complete works for piano in 1991.
Amidst his numerous compositions (sad to say, little known to melomanes) we have chosen this Ronde full of drive and spontaneity (taken from the anthology Quatre chansons de Paul Fort).

Edmond Borsent (1904-1986) - Henri Dutilleux (1916) Pour une amie perdue (1942)
This melody appeared in a group of five in 1943. Amongst the others was Regards sur l’Infini on a poem by Anna de Noailles. In the melody heard here, a succession of simple yet refined chords gives rise to the sadness of the song. The whole follows an emotional curve culminating in a major triad that brings a sudden gleam of hope.

Louis Aragon (1897-1982) - Francis Poulenc (1899-1963) C (1943)
1943, 8th of December, concert at the Salle Gaveau in Paris. Francis Poulenc at the piano, Pierre Bernac singing. At the end of the recital, an encore. Here is what we are told by Irène Joachim, quoted by Brigitte Massin. She is speaking of the conductor Roger Désormière. “He came towards me, deeply moved. He had just been on a visit to Poulenc and had heard him accompany Bernac in this new melody that they intended to give as an encore. Poetry and music equally magnificent; it was, on a poem by Aragon, a profoundly moving melody. And indeed the emotion of the public was such that they had to repeat it again.” Brigitte Massin adds : “In May and June 1940, the bridges of Cé on the Loire bore the flood of refugees, and the soldiers put to flight, who were seeking to cross the river and reach the south of France.”

Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859) - Louis Beydts (1895-1953) Un cri (1944)
The best of Louis Beydts is in his operettas (Moineau, A l’aimable Sabine) and film music (La Dame de Malacca, La Kermesse héroïque). Towards the end of his life, when I went to show him my own compositions, I used to ask him to play and sing Un cri. I remembered this moving melody when compiling the present C.D. One must not forget that this distinguished musician was the artistic director of the first and famous recording (a 78 tpm) of Pelléas et Mélisande with the unforgettable cast of Irène Joachim, Jacques Janson and Etcheverry, with the conductor Roger Désormière.

Jean Gandrey-Rety (1901-1962) - Henri Dutilleux (1916) Chanson de la déportée (22 septembre 1945)
During the occupation, a considerable group comprising musicians, writers, film-makers was formed round the notion of “Resistance”, giving rise to some major works. For example Figure humaine (1943), text by Eluard, and Cé (1943), text by Aragon, both with music by Poulenc ; Quatre chants de la France malheureuse (1943) music by Georges Auric on poems by Eluard, Jules Supervielle and Aragon ; Les Visions de l’Amen (1943) for 2 pianos, by Messiaen ; finally this melody. La Chanson de la déportée just slightly precedes the masterpiece which is his Sonate for piano.

Claude Pascal (1921) - Claude Pascal J’ai voulu te rejoindre (1982)
The advantage of being one’s own lyricist is the mutual assistance of music and text. Musical inspiration lacking ? The text bears you along ; and vice versa. For example, that was how I came to write, after this melody, the libretto of my light opera for children, Framboise et Amandine, les jumelles de l’espace (the space twins), then for soprano and piano my Quatre Farfelettes and the collection of three melodies, Top Model et Cie, likewise for soprano and piano.

Hamisa Dor - Vladimir Cosma (1940) Promenade enchantée (1996)
Stemming from his fine music for the film Diva, this melody – in a slow waltz tempo – is based on a subtle play of modulations, simple yet refined, coming and going between Phrygian, major and Hypolydian modes. It will be observed that each sequence begins with the leap of an octave, which is an interval of such neutrality that it allows the singer to unfold all shades of expression.

Textes : Claude Pascal
Translation : Gwen Rooke

 

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